Juliette Coanet, auxiliaire de vie chez Titi-services à Nantes
Présente-toi en 3 chiffres
1 : pour l’unicité du corps et de l’esprit lors des interventions. En tant qu’ancienne danseuse, je suis sensible au rapport au corps, à son langage. C’est une dimension très importante dans ce métier. Nous entrons en relation avec la personne, par notre présence physique dans son espace, par son interaction lors des interventions.
6 : nous sommes 6 dans mon équipe. Si nous intervenons seule au domicile de la personne, nous ne sommes pas la seule à intervenir. Nous venons après ou avant le passage d’une collègue. Nous communiquons régulièrement avec le cahier de liaisons, WhatsApp, et lors de réunions. Nous faisons partie d’une équipe et c’est essentiel de l’avoir à l’esprit.
5: comme les 5 sens que nous sollicitons toute la journée lors des interventions. La vue : nous observons la personne, son espace, regardons si quelque chose a bougé, est intrigant… L’odorat, car c’est un formidable détecteur, des actions à effectuer, aérer le logement…
L’ouïe car nous somme perpétuellement à l’écoute, y compris des silences. Le toucher, lors de l’aide à la toilette, de l’habillage. Nous devons questionner ce rapport au corps, veiller aux besoins de la personne, est-ce qu’elle en a besoin ou est-ce difficile, trop intrusif… Et enfin le goût, lors des préparations culinaires, mais aussi plus largement, une attention aux goûts des personnes.
Si tu devais présenter ton métier par un objet
Le couteau suisse. En tant qu’auxiliaire de vie, nous avons en permanence un couteau suisse multi-compétences dans notre poche. Nous les déployons en fonction de l’intervention et de la personne.
Une belle rencontre
Il en existe tellement… Comme je dois choisir, je dirais la rencontre avec monsieur C. que j’ai accompagné jusqu’à sa fin de vie. Il avait une vie très éloignée de la mienne. Il avait été légionnaire et vivait dans un logement très atypique. Avec lui, j’ai bougé mes représentations. C’est l’un des intérêts du métier de faire bouger les lignes.
Sortant de formation, j’ai vu à quel point auxiliaire de vie était un métier d’adaptation. Dans notre pratique nous devons vouvoyer les personnes, parce que cela a du sens. Avec lui ce n’était pas possible, il ne le voulait pas. De même il m’appelait par un surnom, ce que je n’accepte jamais… Lors de cette mission, j’ai très vite compris à quel point nous nous adaptons, pour que l’accompagnement soit ce dont la personne a besoin, au delà des gestes techniques.
Ton rêve pour le secteur du service à la personne
La mise en place d’une réflexion de tous les acteurs du secteur pour reconsidérer nos métiers à la hauteur de l’urgence sociale de la grande crise que nous traversons. Le mot « rêve » me dérange. Car ce n’est pas un rêve, c’est une urgence sociale, pour que mes collègues et moi-même, puissions vivre dignement de notre travail.
J’ai un autre rêve : que mes collègues cessent de penser comme l’inconscient collectif : que c’est notre karma d’aider les autres, d’être corvéable en tant que femme. Nous sommes des salariées et en tant que salariées, nous devons faire valoir nos droits. Notre mission à faire du bien, n’efface nullement notre droit légitime d’être considérée et respectée en tant que salariée.